jeudi 29 mars 2012

Angles et points de vue, sols, murs et murmures


Finalement, en quoi consiste le métier d'écrivain ?
A regarder la réalité sous un autre angle. A observer les "choses".
A les goûter.
A les nommer, ensuite, comme on les entend, comme on les voit.
Comme on les sent.
C'est donc une histoire de points de vue, ni plus ni moins.





Il y a un côté "je regarde par le petit trou de la serrure".
Un truc d'enfant. Quoi d'étonnant ? Promis : j'ai rien vu !
Je ferme les yeux. Je les ouvre de nouveau. Sols bruyants.






Je lève la tête, droit devant. Murs qui murmurent.



Continuez, je vous écoute. Et vous, vous entendez ?



Alors, sur quelle pierre faut-il s'appuyer pour que le mur délivre son secret ?

mercredi 28 mars 2012

Comment va Michel ?


Michel va bien, merci.


Il n'a pas encore été englouti par les sables mouvants.
Il lève le nez pour étudier la carte du ciel et compter les mouettes comme d'autres comptent les vaches le nez collé à une vitre de train.


Rondeur des jours par ici, et jeu de cache-cache avec le soleil. Allez, on enlève les chaussures...


Drôle de sensation, le sol est tantôt dur voire rugueux, tantôt mou et gourmand. Un mouvement et l'on s'enfonce, happé par...



Mieux vaut ne pas savoir qui se cache là-dessous. Ne pas demander à l'auteur en moi. Michel, qu'en penses-tu ?
- C'est LUI !
Lui, le D.
Une petite pensée pour tous ces pèlerins qui affrontaient l'ensablement pour se rendre à l'abbaye du Mont.


Une pensée pour leurs pieds décongelés par les flammes des immenses cheminées présentes dans la Merveille.
Tout de même, quelle folie de construire un tel ensemble monastique sur l'eau ! Michel voulait-il littéralement marcher sur l'eau, sur les pas d'un autre ?
Et voilà qu'on se surprend nous aussi à avancer sur ces terres englouties, ces terres gloutonnes, ça fait splotch splotch et ne laisse pas de traces, ou si peu.


Les pèlerins du jour sont de nature touristique, qui avec une canette de bière, qui avec un cheval, qui avec un pantalon roulé jusqu'aux mollets, le but est le même : ne pas sombrer, ne pas disparaître.


Et c'est là que tout prend sens, que les idées s'éclaircissent ou se confirment.
De retour du Mont-St-Michel, je reprends le brouillon de "L'assassin du calendrier", un projet sur lequel je travaille depuis un an maintenant. Pour point de départ, les Très riches heures du duc de Berry et la collection "Pont des arts" (chez Elan vert), dans laquelle j'ai déjà publié un livre sur les Ménines de Vélasquez, Moi, princesse Marguerite. Imaginer une histoire qui oblige le lecteur-spectateur à regarder l'oeuvre de manière différente. Dans le cas des riches heures, j'ai choisi d'écrire un polar.


Le décor du Mont-St-Michel n'est certes pas le même que celui du livre d'heures des frères de Limbourg (comme le montre le mois de mars publié ci-dessus), mais l'ambiance rejoint celle de mon texte - une bataille entre le bien et le mal, les interrogations du Moyen Âge, Dieu et le Diable, la société moyenâgeuse, les positions des chevaliers, des moines, des paysans, la dureté de la vie, son côté "fataliste"...

Une histoire d'âmes.

Sables mouvants, Sables émouvants, pour reprendre le titre d'un très bel album de Thomas Scotto et Eric Battut.
L'histoire d'un petit garçon assis dans le désert et qui pense à son papa parti pour un long voyage. Perte, tristesse, mais âme et hommage aussi, à un petit prince que nous connaissons tous.


Le petit Prince a-t-il foulé les sables avec Michel ? Et si les sables l'avaient avalé, quelle forme auraient-ils pris ? Qu'aurais-tu dessiné, Michel ?


- Un boa prince. Dis, il va s'en sortir, cet enfant de Saint-Exupéry ?
Michel, tu t'inquiètes pour rien, le petit malin a fait pousser un babao pour remonter des entrailles de la Terre et grimper jusqu'aux étoiles afin d'éteindre les réverbères à temps.
- Ah !



Mais je m'égare. J'ai peut-être oublié l'ombre de mon âme dans le sable. Par chance, il fait soleil aujourd'hui aussi, et mon ombre pourra rentrer à Morteaux-Couliboeuf sans être balayée par la pluie et le ciel gris.

mercredi 21 mars 2012

Retour de vadrouille


Me voilà de retour, donc, avec un peu de printemps dans les poches.


Je sais, c'est peu, mais c'est déjà ça ; à vous, ces quelques fleurs d'ombre,
cet arbre du partage, ces insectes bleus aux yeux étonnés.
A suivre, en même temps que le soleil.

jeudi 15 mars 2012

Promenade instructive (ça continue)


Parfois, on se dit qu'on va à un endroit, et au détour d'un chemin, en voyant un panneau d'indication, on prend une autre route et on atterrit à Bayeux pour s'extasier devant une bande dessinée de plus de 68 mètres de long, euh ! pardon, devant une tapisserie vieille de 930 ans.


Cela faisait des lustres que je voulais la voir. Je n'ai pas été déçue du voyage.
Un voyage dans le temps, au fil des fils de laine qui tissent racontent une histoire, la nôtre et celle des Anglais, d'ailleurs nombreux.
On n'a pas l'air malin avec nos espèces de téléphones qui parlent et jouent de la musique. On obéit à la voix qui nous montre et nous porte, enfants dociles et émerveillés, curieux d'apprendre. Même s'il est question de conquête et de batailles.
On avance quand on nous dit d'avancer, de remarquer les jambes nues des soldats sortant de l'eau...


... d'admirer telle posture du cheval une patte dans la barque les trois autres s'élançant vers les terres à conquérir, le sourire de tel animal heureux à l'idée d'aller se battre pour la gloire de Guillaume. Et l'on se surprend à sourire avec lui, pour une raison bien différente.
Et cette main. Et ce tonneau. Et ces regards. Et cette tête coupée, détachée de son corps.


Quelle maîtrise du dessin, à la fois simple et détaillé !
Les habits, les expressions des visages.


L'action, comme ces soldats en train de couper les arbres qui gênent le passage de l'armée.


Le mouvement, comme le vent qui souffle dans les voiles des drakkars, par exemple.


Les couleurs aussi, qui sont là pour que se détache tel ou tel élément par un jeu de patchwork et d'opposition. Pour faire corps, masse épaisse, armée, force.
Quand on pense que la tapisserie a été achevée en 1082, on croit rêver devant tant de modernité, d'avance sur le temps.
Eh oui ! le temps se moque de nous. Et si nous ressortions nos vieilles blouses ?
D'après un ami illustrateur, 2012 est l'année de la blouse.


Mesdames, ne cherchez plus.


Et si vous préférez confectionner avec vos doigts de fées ces jolis vêtements de soirée, vous trouverez de l'aide non loin.


Une petite faim ? Rendez-vous à côté.


Comment ça, vous êtes perdus ? Demandez votre chemin !


- Le parking ? Suis l'arbre qui flèche.


A Bayeux, tout raconte une histoire.

vendredi 2 mars 2012

Une semaine à l'école

C'est parti ! Les ateliers d'écriture ont commencé en classe.
En Petite Section, Grand-mère lit une histoire de Petit Chaperon rouge avec un loup violet. Il mange des oignons et ça pique, ça le fait pleurer.
Conclusion : un loup qui pleure ça ne fait pas peur !
Alors, on s'occupe du Petit Chaperon... de quelle couleur déjà ?
Rose ? Jaune ? Bleu ? Vert ? Violet ?
Hum hum, en tout cas, il marche, ce Petit Chaperon-là.


Le vrai, le bon, le rouge, viendra la prochaine fois.

En Moyenne Section, qui a dit qu'on avait peur du loup et du noir ?
C'est pas eux, c'est pas eux. La preuve.







En Grande Section, on s'occupe de la fameuse galette de l'histoire.
Comment ? Vous n'avez jamais goûté la galette de papier ? La maman du Petit Chaperon vous conseille fortement le Livre des desserts dégouloutants, où l'on trouve des recettes... déliciloutantes, dont le gâteau à tout et la bûche aux clous... Miam !

Chez les CP-CE1, le Petit Chaperon lit, lui aussi. Enfin, elle aussi, quoi !
Un conte, des albums, des petits papiers de bavardage avec le loup, un dictionnaire, un magazine (tout ça reste secret pour l'instant, patience).

Les chaperons du CE2-CM1 sont sortis dans les bois avec leur petit carnet pas rouge (on ne peut pas tout avoir) et leur petit panier (sans galette et pot de beurre).
Le carnet de promenade bien rempli d'impressions et de dessins, le panier débordant de feuilles, branches et autres trésors nous offrent une base de travail extraordinaire pour écrire.
- Qui a ramassé la crotte de loup ? Personne ? Bon...
Quelques photos sur le chemin le plus long dans la forêt profonde : le bois des Terres Noires, qui porte bien son nom.







Nous n'avons pas vu la Bête, mais des petites bébêtes, si.



Cris. Chut-euh ! Rhâââ, impossible d'enregistrer le cui-cui des petits zoiseaux avec ces zozos en furie !
Quoi ? C'est déjà l'heure ?


Ambiance de fin du monde en quittant les bois jolis.




Un grand merci à Véronique et son bus - étrange apparition dans la nature - à Nelly pour le bois et le fléchage - nous ne nous sommes pas perdus - enfin à Cyril notre accompagnateur surprise qui a fermé la marche - si le loup y'était il le mangerait, lui et pas nous, hé ! hé !

Quand on parle du loup... Les CM1-CM2 se sont occupés de lui, justement. Vous ne croyiez tout de même pas que le loup ne lisait pas ? Il lit, oh que oui !
Des romans, policier, fantastique, un conte détourné, un album CD, des poèmes, une histoire drôle, une BD, le journal (quelle rubrique, à votre avis ?).
Et bien sûr... La revue du chasseur. Mais pas celle que vous connaissez.
Vous lirez.
Et vous verrez.